L’épilepsie et les troubles du neuro-développement : quel est le lien ?
L’épilepsie peut avoir un impact considérable sur la vie quotidienne d’une personne en termes d’indépendance, de sécurité, de bien-être mental et d’inclusion sociale. C’est une population hétérogène et assez mal connue; par exemple, on manque de chiffres sur ceux qui sont en situation de handicap à cause de leur épilepsie et/ou de troubles ou déficiences associés. Cet article vise donc à donner un large aperçu des particularités de la vie avec l’épilepsie et à expliquer pourquoi nous en parlons dans le domaine des troubles du neuro-développement.
Qu’est-ce que l’épilepsie ?
L’épilepsie est une condition neurologique reliée à un déséquilibre dans les réseaux du cerveau. Elle se caractérise par la présence de crises épileptiques récurrentes et par des conséquences psychologiques, sociales et cognitives. Une crise d’épilepsie est une manifestation clinique transitoire, liée à une activité électrique, neuronale anormale des cellules du cortex cérébral. Durant la crise, les neurones s’activent, pouvant générer jusqu’à 6 fois plus d’impulsions par seconde qu’en temps normal.
La prévalence de l’épilepsie, comme celle des TSA, est d’environ 1% de la population générale en France. Il s’agit d’une condition qui peut être efficacement prise en charge avec un traitement médicamenteux : 70% des enfants et adultes épileptiques sont libres de crise avec un traitement adapté. Cependant 30% des cas sont pharmaco-résistants. Ces personnes ont au moins une crise par an, alors qu’elles ont un traitement adapté.
L’épilepsie sévère est définie comme un handicap depuis 2011. On l’appelle « sévère » en raison de son impact sur la capacité à mobiliser ses compétences et du danger qu’elle représente (blessure, état de mal, SUDEP – « Mort subite inattendue en épilepsie ») contre lequel la personne ne peut ni s’autoprotéger ni prévenir un aidant…! Même non sévère, elle peut être source de handicap en raison de l’imprévisibilité des crises, des effets secondaires des traitements, d’un manque d’autonomie, d’un manque de confiance ou de séquelles neuro-développementales.
Différents types d’épilepsie
Les origines et les pronostics de l’épilepsie sont très divers comme mentionné ci-dessus (ex. génétique, maladie rare), ainsi que les types de crises. Des crises peuvent prendre différentes formes et avoir différentes intensités. En raison de ces nombreuses manifestations, on dit parfois qu’il y a des épilepsies.
- Les crises tonico cloniques sont les plus connues du public parce que ce sont les plus ‘spectaculaires’ avec perte de conscience, raideur brutale entraînant une chute, secousses convulsives, parfois apnée, cri, bave, perte d’urine ou morsure de langue. La personne perd immédiatement conscience et ne se rappelle de rien.
- Les absences entraînent une suspension de conscience pouvant durer quelques secondes voire plus et se répètent souvent plusieurs fois dans la journée.
- Les crises myocloniques qui sont des secousses musculaires brèves peuvent survenir en pleine conscience.
- Les crises atoniques sont caractérisées par une brusque perte musculaire qui provoque une chute soudaine.
Épilepsie et troubles du neuro-développement
Alors pourquoi parler de l’épilepsie en relation avec les troubles du neuro-développement ?
Car les épilepsies de la petite enfance sont souvent sources de troubles du neuro-développement (TND), soit que la maladie génétique ou la lésion du cerveau à l’origine des crises soit aussi cause de TND, soit que la répétition des crises perturbe le neurodéveloppement. On sait aussi que les enfants atteints de TND ont davantage de risque d’être épileptiques que la population générale.
Des enfants atteints de TND peuvent développer une épilepsie soit dès l’enfance soit plus tardivement. Par exemple, 8% des enfants porteurs de Trisomie 21 ont une épilepsie, 28% des plus de 45 ans ; 18% des enfants TSA sont épileptiques, 28% des adultes. Ainsi, l’épilepsie est souvent une condition qui se chevauche avec d’autres troubles neurodéveloppementaux (ex. TDAH, DYS etc) et psychiatriques (ex. anxiété et dépression) et troubles de comportement.
Il est donc important de tenir compte des conditions coexistantes afin de mieux comprendre les besoins uniques de chaque personne.
Repérage des TNDs chez une personne épileptique
Aujourd’hui nous avons une meilleure connaissance des TND chez les personnes épileptiques grâce à :
- La systématisation des bilans neuropsychologiques dans les centres de référence épilepsies rares
- De gros progrès dans le traitement des encéphalopathies épileptiques (épilepsies graves de la petite enfance)
- La volonté des familles soutenue par les neuropédiatres de favoriser le développement de l’enfant
✔ Oui, il faut faire une recherche de TND dès que l’on a un doute, lorsqu’il y a une épilepsie précoce, même si elle a pu être stabilisée.
✔ Oui il faut faire une recherche d’épilepsie chez un enfant ou adulte atteint de TND, dès qu’on a un doute. Soigner l’épilepsie a un impact positif sur le développement de l’enfant et sur les troubles de l’enfant ou l’adulte.
✔ Oui, il n’est jamais trop tard : même chez un adulte épileptique depuis l’enfance, il est utile de comprendre et prendre en charge ses TND (et vice-versa).
Obtenir un diagnostic peut aider à identifier et mieux comprendre les besoins d’une personne. Cette vidéo donne un aperçu du déroulement du diagnostic de l’épilepsie. Le processus peut être complexe en raison du chevauchement des troubles. Par exemple, une épilepsie peut passer inaperçue car certaines crises d’épilepsies peuvent être confondues avec d’autres troubles moteurs. Aussi parce que rechercher une épilepsie chez un enfant ou un adulte atteint de TSA ou déficience intellectuelle sévère peut être complexe. L’EEG ou l’IRM demandent que la personne accepte l’examen et reste tranquille le temps nécessaire. Il existe pourtant des moyens pour l’aider à comprendre et accepter l’examen. Par exemple les fiches santeBD.org sont d’excellents outils pédagogiques pour expliquer le processus de manière visuelle. C’est important aussi de prévenir l’équipe qui doit réaliser l’examen afin d’en faciliter le déroulement en tenant compte des besoins de la personne.
Prises en charge adaptées
À quoi ressemble l’inclusion pour les personnes épileptiques ?
Tout d’abord c’est considérer la personne dans sa globalité et tous les troubles qui lui sont associés. L’inclusion c’est:
- se sentir en sécurité vis à vis de l’imprévisibilité de ses crises d’épilepsie (aménagements matériels, présence humaine)
- mobiliser ses compétences
- être soutenu dans un environnement adapté à ses troubles du neurodéveloppement.
Depuis la petite enfance (crèche, école maternelle) jusqu’à l’âge adulte, il faut penser l’inclusion des personnes épileptiques dans un milieu aussi ordinaire que possible et aussi dans les établissements et services médico-sociaux. Pour cela une bonne connaissance de l’ensemble des difficultés de la personne, et aussi de ses compétences est indispensable pour l’aider à bâtir un projet de vie épanouissant.
Les recherches nous permettent de mieux connaître la population, les troubles associés et les impacts sur la santé mentale, la famille et la vie sociale et est donc une facette essentielle dans la quête pour l’inclusion.
RESSOURCES
- Les Centres de référence des épilepsies rares – CARTE DES CENTRES
- Dans la région nous avons : HFME et Hôpital neurologique Pierre Wertheimer qui est aussi un des 8 sites constitutifs du centre de référence épilepsies rares.
- Il y a aussi des centres de compétence épilepsies rares dans les CHU de Grenoble, St Etienne et Clermont-Ferrand.
- Les épilepsies rares font partie de la filière maladies rares du neurodéveloppement DéfiScience (maladies rares du développement cérébral et de la déficience intellectuelle) – CARTE DES CENTRES
- Le centre national de ressources handicaps rares – épilepsie sévère
- Fédération des Associations de personnes handicapées par des épilepsies sévères
- Des maladies rares avec épilepsie sévère